La création de l'oeuvre d'art est le point d'aboutissement non pas d'une spéculation intellectuelle de la part de l'artiste, mais d'une conduite essentiellement technique. Toutefois,il est aussi certain que la technicité seule n'a jamais permis à un artiste, quel qu'il soit, de réaliser une oeuvre communicable. L'artiste appartient à la société dans laquelle il vit. Il ne possède pas de cette société une expérience identique à celle d'un mathématicien ou d'un littérateur. Mais il est tout à fait arbitraire de décider laquelle des expériences, celle du physicien, celle du biologiste, celle du mathématicien, celle du poète, celle du juriste, est supérieure aux autres; le problème ne se pose pas en termes de supériorité ou d'infériorité. Toutes les activités sont égales en valeur. Le seul critère de qualité doit être cherché non pas dans une comparaison entre choix des disciplines et des matériaux, mais dans la plus ou moins grande perfection d'utilisation de ces matériaux et des techniques qui ont été retenues pour élaborer par l'utilisateur. D' où il résulte que, sans adopter de nouveau une conception normative du beau, on peut cependant penser que l'étude de l'oeuvre d'art, et la sociologie de l'art, implique l'évaluation de la pertinence et de la qualité des liaisons internes de l'objet créé par l'artiste. On voit ainsi qu'une sociologie de l'art digne de ce nom, et capable de revendiquer un caractère scientifique, implique, non pas la prise en considération de la dispersion dans la société d'objets considérés comme miraculeusement créés, mais une approche nouvelle d'une certaine catégorie d'objets; les objets figuratifs et les monuments, en considération de cette idée que l'artiste représente une des formes d'activité fondamentales de l'esprit. C'est par conséquent, au niveau d'une analyse approfondie des oeuvres que peut seulement se constituer une sociologie de l'art.
Francis MBELLA